PHOTO OBSESSION de Mark Romanek (2001)
Avec :
Robin Williams, Connie Nielsen, Michael Vartan, Gary Cole, Eriq La Salle, Dylan Smith, Alec Boyadjian, Nico Boyadjian, Robert Clotworthy,
Seymour Parish tient, dans un supermarché situé au cœur d'une banlieue aisée, le rayon photographie. Il est donc chargé de développer les photos que lui laissent ses clients, allant de la mère de famille à l'adepte de porno amateur. Grâce à son métier, Parish peut suivre les vacances, les fêtes et les évènements importants des vies de ses clients. Solitaire et mal à l'aise en société, il s'est entiché de la famille Yorkin, et collecte, à leur insu, des doubles de toutes leurs photos depuis des années. Mais, derrière les apparences d'une famille parfaite, riche et aimante, la vie des Yorkins est loin d'être aussi idyllique que Parish le croit. Quelque chose va se casser en lui lorsqu'il va s'en rendre compte...
Mon avis
Une variation sur le thème du voyeurisme au cinéma. Un sujet qui a fait la gloire du septième art, avec notamment des œuvres majeures telles que « Fenêtre sur cour » d’Alfred Hitchcock, "Blue Velvet" de David Lynch, « Le voyeur » de Michael Powell. « Voyeurisme », tel le cinéma et sa caméra qui observe sans être vue, qui s’immisce dans des espaces qui nous seraient interdits. Normal que certains grands cinéastes se soient penchés sur cet œil pervers qui observe, presque illégitimement, comme un viol. Dans « Blue Velvet », Lynch avait magnifiquement relié tous ces points symboliques pour proposer une couche de plus au sublime « Fenêtre sur cour » d’Hitchcock qu’il vénère. Le voyeurisme, résultante d’une société moderne, où le développement des villes et des populations débouche sur une plus grande proximité qui, paradoxalement, engendre inexorablement une augmentation de la solitude. « Proximité », « solitude », « voyeurisme », profondément unis dans la société moderne, un thème universel, pour quelques cinéastes qui recherchent l’intimité avec leur temps.
« Voyeurisme » et « solitude », également au menu de ce « Photo obsession », avec de personnage de Seymour Parish qui, dans une solitude absolue, s’est recréé un monde nouveau, un univers artificiel chargé émotionnellement de la vie des autres. Un univers fictif, qu’il s’est petit à petit approprié, qu’il a filtré, pour obtenir finalement un monde idéal dans lequel il recherche par dessus tout à se fondre. Un monde idéal qui bien sûr n’existe pas, avec ses faiblesses humaines auxquelles Parish va lourdement se heurter. Désemparé, blessé de désillusion et de trahison, Parish, obsédé de perfection, va transformer son rêve fictif en cauchemar réel.
Beaucoup de très bonnes choses dans ce film : outre le pari difficile de cheminer sur le symbole du voyeurisme et de la solitude, le réalisateur Mark Romanek, va superbement observer les mécanismes de la désillusion, ces rêves et ces idéaux brisés, dont on n’arrive pas ou difficilement à se remettre.
Jusque-là, le tableau est assurément réussi mais voilà que le réalisateur qui tenait le bon bout, commence à s’expliquer, justifier les actes de son personnage par un discours moralisateur lourd. Dommage que le réalisateur ne soit pas resté dans la nuance, le non-dit, la suggestion et soit tombé dans une certaine uniformisation fade que nous offre souvent le cinéma américain. Dommage, très dommage !
Enfin, Robin Williams, qui offre une nouvelle dimension à sa filmographie, comme il l’avait entamé dans « Insomnia » de Christopher Nolan. Il semble être l’acteur idéal pour jouer ce personnage de désillusion. Et c’est peut-être normal pour ce comédien qui a baigné sa carrière et ses personnages dans le monde de l’enfance, monde du rêve illusoire par excellence. Il est touchant autant que troublant, très nuancé dans son personnage, et l’on ne sait jamais très bien si on doit l’aimer ou en avoir peur. Assurément, il est l’une des grandes attractions de ce spectacle.